Le tournage d'Adieu, par Pommes Frites
Introduction
« Pommes Frites », membre de notre forum, a eu la chance de participer au tournage du clip Adieu le 4 mai dernier, en tant que figurante. Elle accepte de partager avec nous cette expérience unique, sous la forme d'une interview. Merci à elle !
L'auto-interview de Pommes Frites
Comment tu t’es retrouvée sur le clip ?
On savait grâce aux stories de Specter Berlin et de certains membres de la maison de production Dissidence que Rammstein tournait une vidéo à Paris. C’est geoffrey qui a copié ici même une annonce sur une recherche urgente de figurants “pour le clip d’un groupe de métal mondialement connu”. Sauf que le coquin n’avait pas mis la source de cette annonce ! J’ai fini par la retrouver sur Facebook (dans le groupe dédié à Rammstein) et contacté son autrice via Messenger. En parallèle, j’envoie les infos à Herzwerk ROD.
Nous sommes rappelés tous les deux : on doit venir dès que possible dans un studio de tournage à Saint Denis et prendre avec nous une serviette de bain. On est en effet sur un projet “full body painting” et on me demande si je suis à l’aise avec le fait d’être seins nus (bien que couverts d’argile). Je dis oui tant qu’il n’y a pas de gros plans. Il est 19h.
Je fais toutes ces démarches en tremblant entre l’excitation (un clip de Rammstein !) et la peur (est-ce vraiment un clip de Rammstein ?). Pour des raisons de confidentialité, la personne de la production n’a pas voulu me confirmer de quel groupe il s’agissait. Mon mec n’est pas rassuré du tout. Mes doutes s’envolent une fois sur place. Je signe tout un tas de documents sur lesquels sont inscrits “Rammstein - Adieu”. Mais est-ce que le groupe sera là ? J’aurai vite la réponse une fois en plateau : le premier que j’aperçois, c’est Richard.
Comment tu as été préparée pour le tournage ?
On m’a guidée vers une grand plateau inutilisé pour que je retire mes vêtements et enfile une culotte couleur chair, avant de passer à la coiffure et au maquillage (je serai enroulée dans ma serviette de bain jusqu’à l’étape maquillage). Interdiction d’avoir un smartphone sur soi, même si certains figurants ont réussi à en glisser dans leurs caleçons. Pendant que je me change, je croise des figurants qui repartent. Ils me disent de m’armer de patience car le tournage n’en finit pas. La majorité des figurants (qui ne sont pas des fans du groupe) est arrivée dès 10 heures du matin et beaucoup ont plié bagage à partir de 17-18 heures. D'où la recherche urgente de nouvelles personnes pour les remplacer.
Je passe dehors, enroulée dans ma serviette, pour la coiffure, qui va consister à me plaquer les cheveux en arrière avec une tonne de gel. Je comprends en discutant avec les coiffeurs que la journée a été longue : plus de 150 personnes à préparer… Puis je passe au maquillage, où on va m’enduire de la tête aux genoux d’argile de différentes couleurs. J'enfile des sacs en plastique aux pieds (comme à l’aéroport) et on m’emmène sur le plateau avec un autre figurant. Une fois arrivé, j’aperçois donc Richard, puis tous les autres membres du groupe qui sont enfermés dans une cabane. Autour d’eux, les figurants qui doivent tirer leurs chaînes, taper sur la structure et se comporter comme des âmes damnées. Quelqu’un de la production finit par nous faire signe de rejoindre les autres. Avant, on nous projette de la peinture noire sur le visage et le corps. Il est 20h30, c’est parti pour plus de 4 heures de tournage.
La nudité, c’était pas gênant ?
On n’était pas totalement nus : on avait tous des bas de sous-vêtements couleur chair et on était enduit d’argile, il y avait d’ailleurs de quoi en rajouter au fil du tournage, car ca sèche vite… Après, j’ai fait en sorte de me placer sur le plateau à un endroit où on ne pourrait a priori pas voir dénudée à l’image : j’étais collée contre la structure 90% du temps.
J’ai été ravie de constater que les figurants étaient de tous âges et de toutes morphologies, et plus encore que l’ambiance était très respectueuse : pas de mains baladeuses alors qu’on était collés les uns aux autres, pas de regards lubriques ou de réflexions déplacées… Idem du côté de l’équipe de production et du groupe en lui-même.
Alors, Rammstein, ils sont comment ?
Très pros, très patients, et absolument pas des divas. J’imaginais qu’ils repartiraient dans leurs loges entre chaque prise, mais pas du tout : ils restaient tous en plateau même lorsque les pauses pouvaient allégrement dépasser les 15 minutes. J’avais sur le papier tout le loisir d’aller leur parler durant les pauses : ils étaient assis sur leurs chaises et attendaient que le temps passe ou discutaient entre eux (ils n’avaient pas leurs téléphones). Certains figurants sont allés leur faire la causette, je me souviens notamment d’un couple de Suisses allemands qui a bien discuté avec Schneider. Un autre figurant ne leur lâchait pas la grappe. Mais la très grande majorité n’y est pas allée, dont moi. Cela reste un énorme regret. Mais sur le moment on se dit : “qu’est ce que je vais bien pouvoir leur raconter ? Des banalités ? J’ai pas envie d’être la fan reloue. On verra bien si la discussion s'ouvre naturellement”. Et n’oublions pas que j’étais à moitié nue, et ça ne m’a pas donné la meilleure des assurances pour aller leur parler.
Ca ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu d’interactions avec le groupe. Des échanges de regards, des sourires, un “Bonsoir” (en français) de Till passant à côté de mon groupe de figurants, un “Relax !” souriant de Paul envers une figurante à côté de moi qui, sans faire exprès, tirait trop fort sur la chaîne fixée à son bras.
Oli est celui qui m’a le plus marqué lors de ces pauses. Il a une présence à la fois impressionnante et intimidante. Il est vraiment grand, vraiment très beau, et il m’a donné l’impression d’être un introverti pur sucre. Flake est conforme à l'idée que je me faisais de lui : un papa discret. Schneider aussi : un papa sexy. Il a gentiment échangé avec quelques fans, tout comme Paul. Désolée pour les fans de RZK mais je n’ai pas d'anecdote le concernant qui me revient. Mais à aucun moment je me suis dit : "ils ne sont pas comme je l'imaginais".
Le tournage a duré combien de temps ? Ils n’étaient pas crevés ?
Des infos que j’ai pu collecter sur place, le tournage en tant que tel n’a débuté qu’à 15 heures, le temps que les 150 à 200 figurants soient tous préparés. On a fini de tourner un peu avant 1 heure du matin il me semble. Il y avait deux ou trois plateaux, je n’avais accès qu’à un seul. Dans les autres, j’ai entendu dire qu’il y avait des trampolines et des espèces de caisson de cryogénisation. J’ai aussi aperçu du feu à un moment.
Sur la partie où j’étais présente (20h30 - 1 heure), il y a eu trois grands moments. Rammstein était d’abord enfermé littéralement dans la cabane : à chaque pause, on glissait au groupe par les ouvertures des caisses pour qu’ils puissent s'asseoir à l’intérieur. Puis l’avant de la cabane a été ouvert pour faire des plans rapprochés du groupe + prise de photos. Enfin, le groupe est monté en haut de la structure à la grande panique du management : la tournée débutait 10 jours plus tard. On nous suppliait de ne surtout pas tirer sur les chaînes qui pendaient aux poignets du groupe pour ne pas les faire tomber.
J’ai été impressionnée par le professionnalisme et l’énergie du groupe. Specter Berlin refaisait encore et encore les prises (je pense avoir entendu le refrain d’Adieu 200 fois ce soir-là), et à chaque fois le groupe trouvait de nouvelles idées de mise en scène à l’intérieur de la cabane. Till, surtout, était à fond du tout long. Comment oublier la patate de forain qu’il a mis dans un des murs (en carton) de la cabane, et qui a laissé un bon gros trou dans la structure. Un autre moment dont je me souviens est une fin de prise où Till a attrapé pour rire les bras d’une des figurantes afin de la tirer à l’intérieur de la cabane - sauf que comme les “fenêtres” étaient très étroites, elle n’a pas pu aller bien loin, ce qui a fait rire tout le monde et elle la première.
Donc tout s’est très bien passé ? C’était un tournage parfait ?
Alors euh… non. Il y a eu pas mal de couacs.
Déjà le fait que les figurants n’étaient pas payés, ce qui a provoqué le départ d’un grand nombre d’entre eux tout au long de la soirée. Au clap de fin, je crois qu’on n’était plus que 30 ou 40…
Même si Specter Berlin passait avec aisance de l’allemand à l’anglais et au français, il y a eu des incompréhensions entre lui et l’équipe française. Specter pouvait nous dire une chose, puis l’équipe française nous affirmait le contraire, et vice-versa. Il faut tirer sur les chaînes ! Non il faut faire * semblant * de tirer les chaînes ! Vous n’avez pas le droit de grimper sur la structure ! Si vous pouvez ! Résultat, Specter s’est beaucoup énervé. Je l'ai trouvé vraiment impressionnant, il en impose.
Ca s'est fini comment ?
La dernière scène en boîte (le groupe sur le toit de la cabane), on a fait une photo de groupe avec la trentaine de figurants toujours présents et Rammstein. Elle doit nous être envoyée une fois le clip sorti . Ensuite, on nous a gentiment mis dehors. On avait la possibilité de se doucher… sous une tente collective chauffée, mais avec un jet d'eau froide. Il est 1h du matin, il doit faire 10 degrés, je ne veux pas attraper la mort donc je décline et me débarbouille le visage aux toilettes pour ne pas effrayer les chauffeurs de taxi. Une fois chez moi, mon mec a dû m'aider pour retirer toute l'argile et surtout la peinture noire qui collait bien à la peau.
Bon, on peut te voir où sur le clip ?
Je ne sais pas si je serai à l’image, mais à mon arrivée sur le tournage je tirai la chaîne de RZK. Ensuite j'ai passé beaucoup de temps du côté de Paul, ma tête et l’un de mes bras à l'intérieur de la structure. Le meilleur endroit pour observer le groupe ! J'étais entourée de gens très sympas et j'ai veillé à ce que toutes ces personnes (qui étaient fans) puissent profiter de ce super point de vue. Sinon j'ai pas mal tiré la chaîne d'Oli et de Paul.
Un mot pour la fin ?
C'était une expérience incroyable. C'était fatiguant, interminable même, mais quelle chance d'avoir pu côtoyer le groupe durant plus de 4 heures, d’assister au tournage d’un de leur clip, et d’y avoir joué une toute petite part. Je saurai quoi leur dire si jamais un jour je les recroise. Adieu, j’y étais !